J’ai vu les réfugiés et les déplacés victimes de Boko Haram.

Article : J’ai vu les réfugiés et les déplacés victimes de Boko Haram.
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12 septembre 2015

J’ai vu les réfugiés et les déplacés victimes de Boko Haram.

Des chiffres horribles qui donnent le tournis : Depuis Octobre 2014, 182 attaques ont été perpétrées par Boko Haram au Nigéria et dans les pays voisins. A ce jour, cette crise du Nord-est nigérian a déjà engendré plus de 1 million 580 mille déplacés internes, dont 81 000 au Cameroun, et 135 500 réfugiés, dont 56 400 qui se trouvent au Cameroun. Ces chiffres nous proviennent de l’OCHA (Office des Nations Unies pour la Coordination des Affaires Humanitaires) dont le Coordonnateur pour le Sahel, Toby LANZER, était ce samedi 12 Septembre 2015, aux côtés des réfugiés nigérians du Camp de Minauwo dans l’Extrême-Nord du Cameroun et aussi avec quelques camerounais déplacés internes, victimes eux aussi des exactions de la secte islamiste Boko Haram.

Toby Lanzer et les dignitaires de Minauwao
Toby Lanzer et Najat Rochdi avec les dignitaires de Minauwao

Malgré un contexte sécuritaire tendu, surtout après les récents attentats de Maroua et de Kerawa dans cette région du Cameroun,

Route embourbée de Minauwao
Route embourbée de Minauwao

malgré une route praticable mais qui embourbe les voitures par endroits, Toby LANZER, qui est aussi Sous-Secrétaire Général des Nations Unies, est venu surplace pour réitérer l’engagement humanitaire de l’ONU et de ses partenaires contre la souffrance.

« Il y’a beaucoup de raisons pour lesquelles il y’a de la souffrance au Sahel. Il y’a la dégradation de l’environnement, il y’a la pauvreté, il y’a les conflits »

nous dit Toby LANZER.

«  C’est pour cela que nous sommes ici dans le camp de Minauwao où près de 50.000 personnes ont fui le Nigéria pour prendre refuge ici au Cameroun parce que Boko Haram est entré dans leurs villages et a détruit des vies et leurs biens »

poursuit le Sous-Secrétaire Général des Nations-Unies. Alors Toby LANZER lance qu’il est impératif de soutenir les différentes équipes, agences, ONG et organisations internationales qui se déploient dans ce camp et dans tout le bassin du Lac Tchad, pour, dira Monsieur LANZER,

« pour soulager les populations, les appuyer avec leurs besoins, et faire en sorte qu’elles soient protégées en ayant accès aux vivres, à la santé , aux abris et à divers types d’intervention ». 

Dans ce registre d’interventions, l’éducation, la nutrition, la protection de l’enfance, la sécurité alimentaire, le Wash (Eau Hygiène et Assainissement), sont les plus urgentes et permanentes pour épauler les populations réfugiées et déplacées.

La Population :

            A Minauwao, selon Joseph BEYONGON, administrateur du HCR (Haut Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés), « le camp a une superficie de 319 hectares, et compte environ 45094 réfugiés ». Ce chiffre est sans cesse en augmentation puisque « la semaine dernière, 263 nouveaux réfugiés sont arrivés dans le camp » ajoute Estève ELVY, Camp Manager Officer de IEDA RELIEF (International Emergency ans Development Aid). Avec une fréquence de 18 accouchements par semaine, la population s’agrandit, surtout que, selon l’infirmière accoucheuse de la maternité du camp, « pour l’instant on n’enregistre aucun cas de mortalité néonatale ». Cette bonne nouvelle est à mettre à l’actif de tous les bons indicateurs de santé du camp.

Femme en travail dans la maternité de Minauwao
Femme en travail dans la maternité de Minauwao

La santé :

Plusieurs intervenants s’activent ici dans le domaine de la santé : OMS (Organisation Mondiale de la Santé), MSF (Médecins Sans Frontières) Suisse, IMC (International Medical Corps), l’UNICEF (Fonds des Nations Unies pour l’Enfance), etc. Des locaux aménagés prennent en charge tous les cas possibles en matière de santé, avec l’appui du District de santé de Mokolo, arrondissement où se trouve le camp de Minauwao. En ce moment, et ce depuis le mois de juillet, deux tours de vaccination contre le choléra sont organisés dans le camp. Un troisième tour est en vue dans les prochains jours pour éviter le déclenchement d’une éventuelle épidémie. De même, chaque famille de réfugiés qui fait irruption dans le camp, passe obligatoirement par le vaccin contre la poliomyélite dans la zone de transit avant le camp. Malheureusement, les problèmes de communication sont observables dans le camp. L’anglais est un luxe pour la majorité des réfugiés, alors il faut faire des efforts pour échanger en Haoussa ou en Kanuri avec les réfugiés, la faute à une scolarisation faible ou inexistante dans leurs pratiques culturelles.

L’éducation et la protection :

Etapes Unicef à Minauwao
Etapes Unicef à Minauwao

Avec son partenaire ALDEPA (Action Locale pour un Développement Participatif et Autogéré), l’UNICEF a mis en place dans le camp de Minawao, plus de 6 Espaces Amis des Enfants, des structures récréatives qui ont pour but la prise en charge psychosociale des enfants  selon Fatime TITI, l’une des travailleuses sociales qui travaille pour cette ONG.  « Nous occupons les enfants par tranches d’âge. En matinée ces sont les 3-5 ans, dans l’après-midi, ce sont les 6-18 ans. Nous animons les enfants avec des activités sportives et éducatives », ajoute la jeune Fatime. La prise en charge des enfants en situation d’urgence est une priorité nous dit-elle. Il est donc question d’apporter une réponse adéquate à ces enfants traumatisés par l’horreur de la barbarie qu’ils ont vécue et/ou subie. Fatime est d’autant plus fière que la fréquentation de ces espaces s’accroit de plus en plus. «  Au départ, il y’avait un seul espace dans le camp, et à présent, il y’en a six qui sont fonctionnels. On peut se retrouver à 600 enfants par semaine et par espace ».

Espace Amis des Enfants
Espace Amis des Enfants

La joie de vivre peut se lire dans ces enfants pour qui jouer à l’air libre et en toute sécurité est déjà une victoire, surtout que les parents sont désormais moins réticents à les laisser y aller. Du coup, même les écoles conventionnelles sont plus fréquentées. Un Lycée est même en construction avec du matériau durable.

La nutrition.

Chaque mois, le PAM (Programme Alimentaire Mondial) procède à la distribution des vivres aux populations du camp à travers l’ONG Public Concern qui alimente le camp avec des céréales, des haricots, de l’huile, du sel, des arômes, etc qui constituent un kit mensuel. Malgré cela, les habitants du camp s’adonnent aussi à leurs activités agropastorales. Beaucoup sont venus ici avec leur bétail et la vie se poursuit exactement comme elle se déroulait dans leurs villages avant l’arrivée du groupe Boko Haram.

Le Wash.

La scène qui marque est le lavage des mains systématiques des femmes du camp. Plus loin, les jeunes filles se chargent de puiser de l’eau dans les différents forages aménagés dans le camp, sans parler des activités de lessive aussi. L’eau coule dans le camp et l’hygiène est de mise. Des latrines aussi sot visibles de part et d’autre du camp ce qui confirme l’absence des cas de choléra et d’autres maladies hybrides dans le camp.

Lavage des mains dans le camp de Minauwao
Lavage des mains dans le camp de Minauwao

Tout ce déploiement humanitaire est le fait des ONG et des agences onusiennes, mais également la matérialisation des gouvernements du Cameroun, de la Suisse, du Japon, de la Grande Bretagne et de l’Union Européenne entre-autres.

Acteurs Humanitaires
Acteurs Humanitaires

Accompagné de Madame Najat ROCHDI, Coordinatrice du Système des Nations Unies au Cameroun, Toby LANZER a touché du doigt la réalité de ce camp des réfugiés et après plusieurs heures

Toby Lanzer
Toby Lanzer

à échanger et partager avec les familles réfugiées et déplacées, une conclusion naturelle se dégage de son séjour :

« Mon rôle c’est un rôle de plaidoyer pour faire en sorte de renforcer les moyens pour l’action humanitaire et j’espère bien que tout cela va stimuler le développement des populations et de la région. En fin de compte, sans éducation, sans la bonne santé, sans la stabilité, on n’ira pas loin. En même temps que l’action humanitaire se déploie, il est aussi capital que la stabilité soit une réalité dans cette région ».

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