Filles camerounaises, de grâce, cultivez-vous !
En juin dernier, j’animais un atelier culturel et littéraire dans une classe de Seconde au Lycée Fustel de Coulanges (lycée français de Yaoundé). J’étais impressionné par la manière dont ces ados parlaient avec passion et délectation de l’œuvre « Candide » de Voltaire avec un débat libre, ouvert et surtout très enrichissant. Dans la salle, des jeunes d’origines diverses : subsahariens, magrébins, antillais, occidentaux, etc. Même les artistes Sanzy Viany, et Mbalè Mbalè étaient fascinés. Une ambiance studieuse autour de Madame Akoa, une enseignante française mariée à un camerounais. Rien, mais alors rien ne donne l’impression que ces jeunes, surtout les jeunes filles, résident ici à Yaoundé. Elles sont à des années lumières de ces jeunes filles de nos quartiers.
Dans d’autres lycées de la même ville, le langage n’est pas aussi châtié, la même passion n’est pas autant au rendez-vous. Il suffit de croiser une jeune fille niveau Bac + 3 ou 5, pour constater que c’est du papyrus plat et rien de plus. Les jeunes filles du système éducatif camerounais n’ont pas plus de Q.I. que ces ados de Fustel. Nos jeunes filles elles, déambulent dans les cours de récré ou dans les campus, pour papoter au sujet de la dernière série brésilienne qui est passée la veille sur les écrans des chaines de télé africaines. Lorsque survient l’heure du journal télévisé, elles désertent le salon au motif que « ce n’est pas intéressant ». Il n’est donc pas rare de les voir se scotcher devant les télé-réalités de TF1 ou de NT1, un nouvel opium qui les abrutit davantage. « Stupides du monde, réunissez-vous ! » serait-on tenté de leur dire ; Car, elles ne distinguent pas le vrai du faux, et gobent ces images commerciales, comme s’il s’agissait de la vraie vie. Parlez-leur de la COP 21 ou encore des attentats de Paris, elles n’ont rien à cirer, car leur intérêt se trouve dans la bêtise de leurs commentaires orientés vers les histoires de bas étage, les cœurs brisés, les mecs pas sérieux, et encore qui sort avec qui, qui couche avec qui, et rebelote.
J’ai honte de le dire, mais vraiment, les filles de mon pays sont …Je préfère alors laisser l’artiste AMBE le dire lui-même:
Je ne voudrais pas les insulter, mais j’ai honte. J’ai honte des filles de mon pays. J’ai honte de ma fille adoptive de 15 ans, plantée devant le poste téléviseur cet après-midi parce qu’elle regardait une téléréalité. Lorsque j’ai mis I Télé, elle s’est réfugiée dans sa chambre. Il a fallu que je remette la chaîne de télé Trace Tv pour qu’elle revienne au salon. Je lui ai demandé : « Tu aimerais faire quoi demain » ? Elle me répond : « Chanter avec Maahlox ». C’est vrai que depuis qu’elle a aperçu Maahlox, elle se voit star comme lui. Mais sait-elle au moins que Maahlox s’inspire de l’actualité pour écrire ses textes ? Sans doute son problème est ailleurs. Ce ne sont pas les textes de Maahlox qui l’intéressent, mais le déhanché possible qu’elle pourrait lui apporter comme danseuse. Voilà le visage hideux de notre féminité camerounaise. Je me demande quelles dirigeantes aurons-nous demain ? Ces filles un peu écervelées, toutes, même pseudo-intellectuelles et qui ont pour domaine de définition « soit belle et tais-toi ! ». Pitié, chères sœurs, vous avez plus de valeur que ce qui se cache derrière votre popotin. Il y’a de la beauté dans une conversation soutenue. Il y’a du délice quand j’écoute une fille comme Cynthe parler des TIC, et pas des filles dites androïdes. Il y’a du plaisir à écouter Olivia, quand elle délivre ses théories du droit et de la Communication. Il y’a de l’extase à écouter Reine donner des conférences dans le monde entier.
Voilà une femme, une vraie ! Pas celle qui revendique le droit de se faire prendre pour ses atouts physiques et rien d’autre. Pas celle qui réclame de se faire entretenir comme une éternelle assistée, avec la bénédiction de sa mère et de sa grand-mère. La femme n’est pas un objet. Non ! Et si c’est elle-même qui se chosifie, l’affaire est grave.
Femme de demain ! Cultive-toi ! Bouquine, écoute, cherche, recherche, dans tous les domaines, qu’importe ! Mais cherche ! Sois une experte en agriculture, parce que j’ai offert du chocolat à une doctorante et elle ignorait que le chocolat vient du cacao africain. Sois une experte en musique, et non, en chansons obscènes, parce que je parlais à une fille récemment, elle ignorait qu’il existe des écoles et des conservatoires de musiques. Sois une experte de la mode, surtout pour cette fille étonnée de voir que c’est le coton africain qui habille les stars de la chaîne Trace Tv. Sois une experte en droits de l’homme, je m’adresse à toi, jeune fille qui crois que les droits de l’homme sont un concept savant. Que non ! L’éducation de la jeune fille, les mutilations génitales féminines, les violences faites aux femmes, les questions de genre, la parité, l’émancipation de la femme (qui paye le loyer, achète ses propres vêtements, participe aux charges de la maison), voilà tes droits jeune fille ! Et tu les connaîtras en lisant.
Commentaires