Élève assassiné au Lycée Bilingue de Deido : tous coupables !

Article : Élève assassiné au Lycée Bilingue de Deido : tous coupables !
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30 mars 2019

Élève assassiné au Lycée Bilingue de Deido : tous coupables !

Le Cameroun se réveille choqué ce samedi après le meurtre du jeune élève du lycée bilingue de Deido, à Douala. La scène s’est déroulée le vendredi 29 mars dans l’enceinte de l’établissement scolaire, alors que les élèves prenaient leurs bulletins du deuxième trimestre avant le départ pour les congés de Pâques. Depuis ce drame, les questions fusent : « Qui blâmer ? Comment aurait-on pu éviter cela ? Comment en est-on arrivé là ? »

Les jeunes adolescents du Cameroun s’illustrent depuis quelques temps par des faits divers alarmants, surtout dans les établissements scolaires. Des élèves sont surpris en plein ébat sexuel, d’autres en train de consommer des stupéfiants, certains de plus en plus violents vis-à-vis de leurs camarades. On pourrait donc s’arrêter là en concluant qu’il ne s’agit pas de faits inédits ni isolés, que la violence scolaire est visible partout dans le monde, et qu’il ne s’agit ni plus ni moins que d’un phénomène social.

Mais moi je dis non !

Trop c’est trop !

Nous sommes tous responsables et coupables de ce qui s’est passé au lycée Bilingue de Deido. Nous avons tous contribué à ce meurtre. Oui, le monde des adultes camerounais est devenu violent. La violence est présente partout au Cameroun. Dans les débats télévisés du dimanche, dans la bataille politique, dans les sphères religieuses, et par-dessus tout, dans les différents foras des réseaux sociaux. Nous avons appris le langage de la haine à nos enfants. Nous leur avons appris le langage de la séparation, nous leur avons appris le langage de la division et de la différence. L’école est supposée cultiver l’équité et le vivre-ensemble. Mais hélas, elle est devenue un laboratoire de l’échec social. Nos enfants vont à l’école pour être des citoyens, mais au contraire, ils se marginalisent. Ils savent que les parents veulent des notes. Alors ils nous offrent des notes. Ils récitent leurs cours, obtiennent des 19/20 et les parents sont contents. Pendant ce temps, sur le câble, le satellite et les réseaux sociaux, nos enfants sont devenus des fous ambulants. Leur langage est devenu celui de la jungle, et les parents observent. Les clips sont devenus de vrais cirques d’obscénité, mais les parents se taisent. Les parents veulent les diplômes, alors les enfants nous offrent ces diplômes, en trichant, qu’importe ! Les parents veulent les diplômes. Quand bien même ces diplômes ne permettent pas à ces enfants de formuler une phrase correcte, ou de respecter la concordance des temps, les parents veulent les diplômes. La course aux diplômes a fait oublier quelque chose de fondamental : le développement du jeune adolescent.

Nous avons oublié que jusqu’à l’âge de 18 ans, ces jeunes sont des enfants. La semaine dernière, une vidéo de filles mineures camerounaises se livrant à des pratiques sexuelles a circulé sur les réseaux sociaux. L’UNICEF a demandé l’arrêt immédiat du partage de ces vidéos qui semblait amuser certains adultes.

 

De même, il y’ a quelques années, une jeune fille de 14 ans environ, visiblement atteinte de troubles mentaux, s’est littéralement déshabillée dans un bus, et les adultes n’ont rien trouvé de mieux à faire que de filmer la scène et de la partager sur la toile. Voilà la société perverse dans laquelle nous plongeons nos enfants. Nous bafouons leur dignité, leur honorabilité, leur intimité. Quel pays voulons-nous bâtir si nous détruisons les mœurs  de nos mineurs ?

Il est plus que temps de sauver nos adolescentes et nos adolescents. Cela commence par la protection. La protection physique, mais davantage psychologique de ces êtres fragiles. Nous avons entraîné ces enfants dans un océan de précocité. Et pourquoi ? Parce que les distractions se font rares. Parce que récemment encore, une société brassicole a organisé une campagne de consommation de produits alcooliques à vil prix, et… les adolescents se sont précipités et personne ne s’en est indigné. Parce que les matchs de football à la télévision sont précédés par des publicités de boissons alcoolisées. Parce que les affiches et les banderoles se mettent à proximité des établissements scolaires. Parce que les élèves investissent les bars et les bistrots (parfois en tenue scolaire) et ils sont servis. Parce que les mineures commandent des whiskys et des liqueurs en boite de nuit, et personne ne leur demande la présentation de leur carte d’identité. Nous avons démissionné de nos valeurs. Nous avons fuis nos responsabilités. Nous n’inscrivons plus nos enfants dans les centres culturels et dans les bibliothèques. Au lieu de lire «  Le club des cinq » « Science et vie Junior » « Phosphore » ou « Okapi », des romans et magazines qui stimulaient notre croissance, ils lisent le langage ordurier et le verlan versés sur les publications des réseaux sociaux. Nous avons encouragé cela. Car l’école ne suffit pas (ou plus).

Certains m’ont fait le reproche depuis le temps de rester scotché à l’émission « LES COPS D’ABORD » qui rassemble des jeunes scolaires du Cameroun à travers un quiz de culture générale. Ils me disent : « Mais DANIA, qu’est-ce que tu fais tout le temps avec ces gamins ? Pense un peu à ta carrière. Une émission pour jeunes te rapporte quoi ? ». Oui, les émissions pour jeunes sont observées comme du folklore. Mais hélas, devons-nous abandonner cette jeunesse ? L’école ne leur apprend plus qu’ils doivent s’aimer, qu’ils doivent vivre ensemble, qu’ils doivent bâtir ce pays ensemble. L’école ne leur apprend plus qu’ils doivent cultiver une émulation saine. L’école ne leur apprend plus que les peuples du Cameroun sont plus ou moins liés par l’ancestralité, malgré les divisions apparentes. Non, l’école ne leur apprend pas tout. Alors nous faisons une activité bien nommée APPS, « Activité Post et Péri Scolaire », qui complète le travail des enseignants. Nous les emmenons se cultiver, connaitre le monde qui les entoure, nous leur apprenons à maîtriser leurs droits, à s’exprimer, à donner des opinions, à respecter des ordres, à s’engager pour être les leaders de demain. Voilà pourquoi, nous disons haut et faut : «  LES COPS D’ABORD », cops ici comme copains, ou comme cops, synonymes d’élèves et d’étudiants au Cameroun. Nous ferons une minute de silence le 4 mai 2019 au Palais des Sports, à l’occasion de la finale nationale du challenge interscolaire de l’émission « LES COPS D’ABORD ». Une minute de silence pour cet élève du Lycée Bilingue de Deido, mais aussi, pour tous les enfants victimes de violence au Cameroun. Les 16 meilleurs établissements scolaires du pays, les 16 finalistes qui seront à cet événement, seront là pour nous rappeler que ce sont les jeunes qui sont les leaders de demain. Alors, LES COPS D’ABORD !

J’ai dit !

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Commentaires

Chris
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Et c'est dit, les parents qui passent peu de temps avec leurs et qui refusent les avis des enseignants qui connaissent un peu mieux les eleves (donc la personne).
Et certains enseignants péchant faute de pédagogie éducationnelle.
#Formation des éducateurs (parents et enseignants)