Au pays de la solidarité

Article : Au pays de la solidarité
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6 avril 2014

Au pays de la solidarité

Les gens ont beau dire, beau proclamer ce qu’ils veulent, mais la France est un grand pays. Cette grandeur, je ne la mesure pas au sens des indicateurs macroéconomiques, militaires ou stratégiques, mais au sens de la Solidarité. Un mot qui veut pourtant dire beaucoup en Afrique. On dit en Afrique que nous sommes solidaires, que nous avons le sens du partage, qu’on peut venir chez tonton ou tata sans frapper à la porte, qu’on peut aller habiter chez une cousine sans lui demander la permission. On dit aussi qu’en Afrique, l’enfant est l’enfant de toute la famille. Il suffit d’observer les dots, les baptêmes, les deuils, les anniversaires. Oui, la famille africaine est grande et élargie. En Afrique, lorsque quelqu’un étudiant prépare un voyage pour l’étranger, toute la famille se cotise, et toute la famille pleure à l’aéroport. Elle est émouvante n’est-ce pas ? On n’appartient pas à la famille nucléaire, mais  au village, au groupement, au clan, au canton, à l’ethnie, à la tribu. On appartient au peuple. Vu comme çà, voilà la solidarité africaine.

Pourtant, ce week-end, j’ai observé que la solidarité africaine n’est pas aussi lisible, aussi visible que la solidarité occidentale, et notamment française. En Afrique, la solidarité est un cycle. C’est-à-dire : je contribue au voyage de ton fils aujourd’hui, demain, tu feras de même pour mon fils. J’ai mangé la dot de ta fille ce mois, le mois prochain, tu mangeras la dot de ma fille. Cette famille nous a assistés lors du deuil de notre patriarche, nous ferons de même à leur deuil. La solidarité africaine est donc une grande tontine. C’est du vrai donnant-donnant, masqué par une forme hypocrite de contrition, d’implication ou de secours moral. La solidarité africaine est un peu calculée mes frères. Je sais de quoi je parle. Par contre, je suis ébloui par le pays de la Liberté-Egalité-Fraternité. Ce pays là vient encore de me montrer que sur toutes les chaînes de télé on a marqué le numéro court : « 110 ». C’est le Sidaction.

110

Sidaction :

Vingt ans que ça dure, et les Français sont appelés chaque année à contribuer pour lutter contre le mal du 20e siècle. La recherche, les malades, la prévention ont ici une occasion d’espérer par les dons offerts par les Français. Un week-end pour espérer, un week-end pour se mobiliser. Voilà une solidarité active et participative. Rien, mais vraiment rien à voir avec la solidarité de mendicité observée ici et là en Afrique, là où le sida devient objet marketing pour recevoir des financements des ONG ou des organisations internationales pour des fins autres que « le sida ». Les détournements de fonds du sida sont légion au Cameroun, c’est connu.

 Opération Pièces Jaunes :

S’il y a une « première dame » qui me marquera toujours, c’est bien Bernadette Chirac avec son opération « Pièces Jaunes ». Initiative de la Fondation hôpitaux de Paris-hôpitaux de France, cette opération vise à améliorer la vie des enfants et des adolescents dans les services de pédiatrie. C’est leur redonner du sourire à travers des maisons de parents, des salles de divertissements, des aires de jeux, etc. Cette solidarité des pièces jaunes a permis de financer près de 7 000 projets depuis 1990. C’est un geste en or qui sauve des vies. Une opération coup de cœur qui n’a rien à voir avec l’opération « Coup de Cœur » tristement célèbre au Cameroun en 1994. Entreprises, opérateurs économiques, particuliers, tous avaient mis la main à la patte (poche) pour accompagner les « lions indomptables » pour la Coupe du monde 1994. Cet argent avait tout bonnement été détourné. Le ministre de la Communication de l’époque avait déclaré aux journalistes : « L’argent se trouve quelque part entre Paris et New York ». Vingt ans après, aucune trace de cet argent. Aucune enquête ouverte.  Au Cameroun, les appels à contribution finissent toujours ainsi. Plusieurs artistes décédés se sont sans doute retournés dans leur tombe parce qu’au nom de la solidarité, un des compères de l’artiste décédé débarque, et décide de lancer la quête pour le deuil, et à la fin, personne ne sait où va l’argent. Savent-ils qu’on ne plaisante pas avec l’argent d’un mort ?

Les restos du Cœur :

Donnez de l’espoir aux démunis, aux oubliés, aux affamés. Les restos du Cœur réunissent des artistes, qui, bénévolement offrent un spectacle annuel « Les Enfoirés » au profit des restos du cœur. L’appel aux dons rappelle aux Français qu’ « aujourd’hui, on n’a plus le droit, ni d’avoir faim, ni d’avoir froid ». L’œuvre de Coluche est ainsi immortalisée et permet à des Françaises et des Français d’espérer des lendemains meilleurs.

Coluche au Coeur des Restos
Coluche au Coeur des Restos

Le téléthon :

Depuis 1987, l’Association contre des les myopathies en association avec France Télévisions organise chaque année, ce qui est la plus grosse collecte populaire au monde. Les maladies génétiques et rares sont au cœur de ce téléthon. Ce marathon télévisuel a mobilisé plus de 90 millions d’euros en 2013.

Les Associations : Secours catholique, Action contre la faim, Fondation Abbé Pierre (lutte contre le mal logement et les phénomènes d’exclusion, reconnue d’utilité publique depuis 1992), sont autant d’associations et de mouvements qui montrent que là où l’Etat ne peut plus agir, notre condition humaine doit se révolter à la simple vue de la précarité de notre voisinage. Certes, ces appels à dons sont souvent entachés de scandales et d’appétits divers, mais je veux saluer ici l’esprit et la mentalité des contribuables. Je veux saluer leur sensibilité, malgré des contextes économiques de plus en plus difficiles. Au pays de la Solidarité, on nous montre que ce qui arrive aux autres, peut m’arrive aussi. Au pays de la Solidarité, on se mobilise contre la maladie, la faim, les inégalités sociales et la précarité. Au pays de la Solidarité, ce n’est pas une question de clan, de tribu ou de village, c’est une question d’Humanité. L’Humanité est une famille. Si l’Afrique le savait hier, elle ne le sait plus aujourd’hui. C’est la France qui donne une leçon de solidarité à l’Afrique. J’offre donc ce café à la France est qui est un grand pays…de la solidarité !

Je veux saluer cette implication massive, régulière, et désintéressée. Car, comme le disait Max Heindel : « Le service aimant et désintéressé à autrui, est la route la plus courte, la plus sûre et la plus joyeuse qui mène à Dieu ».

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Commentaires

DEBELLAHI
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C'est excellent sur le plan de la forme. Irréprochable sur le fond. Une leçon de générosité avec des exemples concrets de solidarité.
Comme vous le dites si bien, la générosité en Afrique se limite au familial, au cousinage, et, au maximum, au voisinage. A titre d'exemple, pour étayer ce fait, un "télé thon" a été organisé par le pouvoir en Mauritanie pour trouver de quoi financer la participation de l'équipe nationale de football au CHAN. Il a réuni 1,5 millions d'Euros. Pau après, une ONG qui s'occupe d'orphelinats a suivi l'exemple, elle a eu à peine 4500 Euros. Faites la comparaison vous-mêmes.