Supprimez le mot « amitié » du dictionnaire !
Oh là, quelle douleur profonde ! Je saigne et je baigne dans une déprime mémorable, le genre de déprime qui est arrivée à son paroxysme ce matin.
Je reviens du mariage de NDO et de ma cousine Alice, enfin, désormais elle s’appelle madame NDO. Ce couple là est né devant moi, au quartier Cité verte, en 2006. Huit ans plus tard, les voilà signant pour le meilleur et le pire. A peine sorti de la mairie de Yaoundé 2, on a pris la direction de ce restaurant de la Communauté Urbaine à la Cité Verte. Ah, la cité verte, ce fameux quartier de mes 400 coups. J’y ai connu tous les accès et tous les excès. J’y ai connu la peur, l’amour, le sexe, mais aussi l’illusion et la trahison. C’étaient les années de gloire avec mon réveil matinal, « Ongola Café », la seule émission qui faisait de l’audience à 4 heures du matin. C’était l’époque de l’émission « A VENIR » aimée et détestée en même temps, entre vedettariat et jalousie des téléspectateurs. C’était cela, la télé, et il fallait l’accepter ainsi. C’était l’époque où mon téléphone sonnait, et sonnait encore. J’étais important, j’étais… incontournable. Oui, je ne passais pas inaperçu, même si cela n’était pas forcément voulu. C’était l’époque où je faisais salle comble au Centre Culturel Français avec les artistes Koppo, Krotal, Sultan Oshimihn, Kareyce Fotso, VBH, X Maléya, etc. (je ne peux et je ne veux pas tous les citer). Oui, tous là venaient me voir. Enfin, ils venaient voir celui que j’étais, c’est-à-dire une simple perche. J’avais alors la naïveté de croire que j’étais important, car j’avais des « amis » importants. Je croyais en nos discussions, nos débats, notre vision d’un Cameroun meilleur. Dix ans plus tard, où en sommes-nous ?
Nous en sommes à ce matin de mariage du couple NDO. Toute la « famille » de la cité verte était là, mais ce n’était plus du tout la même ambiance. J’ai honteusement quitté le restaurant avant l’ouverture du cocktail, car le protocole a cru devoir me mettre sur une table avec deux femmes enceintes. L’ennui et la tristesse étaient garantis. Même le nouvel humoriste Moustik Charismatik a refusé de se mettre à cette table. C’est là que j’ai prétexté une urgence pour m’éclipser. La vérité c’est que je ne suis plus à ma place dans ce monde là. Le monde des artistes et du show-biz, c’est fini pour moi. J’ai cru en la fraternité qui pourrait lier les journalistes-animateurs aux artistes. Là encore, c’est le jeu des intérêts qui prime. Filles comme garçons, à l’exception de quelques rares artistes, ton téléphone pour eux est synonyme d’opportunité. Mon cousin Pitou me disait à cette fameuse cité verte : « Tu es trop naïf et tu es aveugle. Tous ceux qui t’entourent ne te veulent pas forcément du bien ». J’ai botté tous ces propos en touche. Et pourtant, je n’ai pas vu un seul aux obsèques de mon père. J’en ai pas vu un seul lorsque mon ex fiancée m’a quitté (elle aussi parce que je ne brillais plus). Dure réalité qu’est ce monde. Alors ce matin, je me suis demandé ce que je faisais là ? J’avais personne à qui parler, puisque depuis un moment, quand je revois cette bande, je les écoute tous se pavaner, et parler de leurs exploits, et exhiber leurs nouvelles trouvailles ou conquêtes, et rebelote… Non, je ne suis plus de cet univers. Je suis dans le monde sans être du monde, comme le Christ nous demande d’être dans la Bible. Sauf que le Christ avait sans doute oublié que tout cela rime avec solitude. Un ami, tu peux l’appeler à 2 heures du matin et il apparaît. Mais là, si j’appelle Dominique, elle est mariée. Son mari n’appréciera pas. Si j’appelle Viviane, pareil. Olivia est en Afrique du Sud, comme Christelle. Mon cousin Pitou est désormais à Liège en Belgique avec Patrick Ermano qui officie sur la FM RCF. L’aîné Heyndricks qui me donnait des conseils judicieux à ACMS (Association Camerounaise pour le Marketing Social) est hors du pays lui aussi. Tout ce qu’il trouve à me dire ces jours-ci via Facebook c’est : « marie-toi ! ».
Je repensais à cela ce matin, en admirant le bonheur du couple NDO, mais hélas Heyndricks, là encore ce n’est pas une mince affaire. J’ai cherché des filles, j’en ai connu à la pelle, mais la seule que j’ai aimée est partie. J’ai voulu en aimer une autre, mais l’Allemagne a eu raison d’elle. Elle me manque ! Car elle, c’était mon amie. Elle était la seule qui écoutait autre chose que mes émissions, mes spectacles ou mes histoires avec le show-biz. Même mon mentor à la radio, Wally n’est plus là. Tous ces gens enrichissent la diaspora et m’ont laissé ici, dans ce Cameroun qui est émergent aujourd’hui. Ils m’ont laissé orphelin et je n’ai que pour seul ami un écran d’ordinateur pour guetter chaque jour si Jean-Robert Chauvin m’enverra un mail depuis Villeurbanne ou si Lina Trabelsi me fera signe depuis Montpellier. Je me sens si seul, et pourtant, même entouré comme ce matin de mariage, je suis encore plus seul. On m’a dit : « Tu as cru que le monde se fondait sur la vérité et la sincérité. Tu as obtenu que la seule vérité palpable est que l’amitié est une notion éphémère ». Même le jour de ma soutenance, ma voisine de lit m’a lâché. Les jours difficiles sont ainsi hein ? Personne sur qui compter. Seul, mais alors, seul au monde ! Je ne vois plus qu’en eux l’expression de plusieurs « moi » hypertrophiés. Là où l’égoïsme prime. L’amertume saveur d’une jungle urbaine qui ne parle que le langage du cynisme, de la calomnie, et même des coups bas. Bienvenue dans le monde merveilleux, mon enfer. Bienvenue surtout dans le coup de grâce, l’ultime déception de ma vie : L’émission LES COPS D’ABORD que j’ai servie pendant 15 ans, au détriment de mon argent, mon énergie, mon cerveau, mes nuits sans sommeil. Des années à draguer des proviseurs pour avoir une liste de 6 élèves compétiteurs en culture générale. Des années à supplier des autorités pour qu’elles nous payent le transport d’une ville à une autre. Des années à faire le pied de grue devant les entreprises pour obtenir des lots que ces mêmes écoles regardent avec dédain. Des années de galère où plusieurs jeunes du pays de Paul Biya ont appris la radio, l’écriture, mais aussi ma rigueur et ma passion. Il a suffit qu’ils aient une opportunité et les voilà déjà sur le toit du monde à penser qu’ils ont tout compris. Au-delà de l’ingratitude, c’est surtout leur indifférence qui me refroidit. On est vraiment dans la loi de la jungle. Comme un symbole, pour cette dernière émission au mois de mai dernier, seuls Eddy-Christian et Willy, les co-fondateurs de cette émission ont répondu à leur manière. Mais eux, je ne peux plus les embêter. C’est fini l’époque où je pouvais débarquer chez Eddy-Christian à Obogogo ou chez Willy à Olézoa. Ils sont mariés… Oui, le respect de leur intimité m’impose de la distance et c’est assez douloureux comme ça. Je les remercie d’avoir essayé de me comprendre (on dit que je suis incompréhensible). Mais, j’ai eu la larme à l’œil au soir du 17 mai 2014. J’étais dépité, dégoûté. J’étais mal pour toutes ces années de sacrifice qui n’ont accouché que de gens insensibles, indifférents, à la limite, ingrats. Quel jour sans, ce jour-là. J’ai vu défiler toutes les générations de cops, leurs trahisons, leurs coups bas, leurs mesquineries, et par-dessus tout, l’un d’entre-eux qui a délibérément décidé de ne pas venir alors qu’on l’attendait à la réalisation. Il a dû savourer en secret son « délice » de nous avoir fait faux bond. Il était ce matin au mariage de NDO. Avec son éternel faux sourire, je me suis souvenu de l’année 2004, quand son frère, ami, et Dieu d’artiste me l’a présenté. « C’est mon cousin, peux-tu prendre soin de lui ? ». Et moi, j’étais tout fier de rendre service à l’artiste. Comme toujours… Les gens ont vraiment la mémoire courte. Qu’importe ! Je suis heureux de savoir que nul n’est indispensable, surtout pas moi. Alors, LES COPS D’ABORD qui voulait dire les copains d’abord s’avère juste être un mensonge qui a duré 15 ans. J’y ai cru seul, et j’y ai crevé tout seul. Quelle claque ! La douleur est profonde Dolorès. Tu dois te dire que j’ai besoin d’un bon psy. Sans doute auras-tu raison. Mais relis-moi et tu comprendras depuis le début que je suis en train de me psychanalyser tout seul. Une automédication, fruit d’une prescription et d’un diagnostic tout aussi personnels. L’amitié est une illusion Dolorès. L’amitié n’existe pas. Imagine-moi demain, patron, directeur, décideur, ministre, les amis j’en aurais comme en 2004, 2005 et 2006. Imagine-moi devenir Team Press Officer des Lions indomptables, je serais sollicité de partout. Imagine-moi devenir responsable de la communication d’une multinationale, le regard va changer n’est-ce pas ? Je comprends maintenant pourquoi quand les gens changent de statut, ils deviennent arrogants, te regardent de haut et ne décrochent plus tes appels. C’est la rançon de la gloire, dit-on ! Mais, trop peu pour moi ! Je vais encore paraphraser le Christ biblique : « Mon royaume n’est pas de ce monde ». Parce que dans mon royaume, fut-il dans ma tête, ton oui est oui, ton non est non. Dans mon royaume la loyauté existe. Dans mon royaume on appelle un frère pour demander de ses nouvelles et non pour demander un service. Dans mon royaume l’émission LES COPS D’ABORD a son vrai sens. Mais hélas ! J’arrête tout. Ici chez vous, l’amitié n’existe pas, alors supprimez le mot « amitié » du dictionnaire !
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