Un café au très respectable Cabral Libii Li Ngue
Si je te connaissais, les gens pourraient crier au complot de la savonnette. Mais toi et moi nous ne sommes jamais rencontrés. Et pourtant, depuis plus de cinq ans, je t’écoute dans les médias. J’écoute ton langage châtié et fougueux. J’y perçois de temps en temps un peu de zèle, beaucoup d’aisance cognitive, mais surtout de la bonne volonté, cette graine si rare dans le cœur et l’esprit de la majorité des jeunes Camerounais. Je t’écoutais souvent les samedis matins sur les ondes de « Radio Campus » à Yaoundé, et je dois t’avouer, je ne comprenais pas où tu voulais nous embarquer. Tu étais tantôt pour, tantôt contre le régime de Biya. Sur les plateaux de télévision, j’étais contrit de te savoir mêlé à ces diatribes de nouveaux « experts » crées par les nombreuses émissions de débat de l’espace public camerounais. Des débats qui en creux, restent toujours creux. Finalement, j’ai compris que dans la pire obscurité, une simple lueur peut nous sortir de la caverne.
Permets-moi de te dire que tu es cette lueur. Tu as le mérite d’être jeune, d’être brillant, d’être cultivé, d’être ouvert, et… de ne pas céder à l’opportunisme ambiant de la jeunesse camerounaise, défigurée par des aînés dont l’échec cuisant a conduit ce pays à la cacophonie généralisée. Cher Cabral, j’ai été admiratif lorsque tu as expliqué la pertinence de la future délivrance des doctorats professionnels à l’Université de Yaoundé II. Je me suis dit : « Enfin un académicien qui comprend la nécessité de former des professionnels et non des perroquets pour amphis ». Cela n’a rien à voir avec la « professionnalisation » tant prônée et proclamée par le fameux Ndongo. Car, si professionnaliser les enseignements d’après lui, c’est introduire un cours de création d’emploi dans la filière philosophie, alors bien entendu, il ignore de quoi il parle. Simplement parce qu’au Cameroun, on ne sait pas qu’avoir les diplômes ce n’est pas avoir un métier. Passons.
Que dire alors de tes interventions dans les plateaux de télévision. Tu ne t’en rends pas compte, mais tu es au-dessus de la mêlée. La masse est trompeuse, et tu as su t’en démarquer, même devant un charlatan de journaliste qui a osé te parler d’un mythe Béti qui avait la saveur nauséabonde d’une intimidation. Crois-moi, ce n’est qu’une question de temps, et la République de l’intimidation n’existera plus au Cameroun. Ton courage est en la preuve.
Oui, Cabral, fonce ! Je sais que tu fais face à une épineuse jalousie inévitable dans ce pays qui a perdu tout repère de méritocratie. Mais il ne s’agit pas de cela. Tu es désormais au-devant d’un sacerdoce dont tu n’as peut-être pas encore conscience, celui de montrer un autre chemin, celui de la crédibilité, de la dignité et de l’intégrité, denrées devenues rares dans notre société actuelle.
Merci, parce que toi au moins tu sors des sentiers battus. Merci, parce que dans ton langage juridique, tu connais les lois et l’esprit des lois. En bon constitutionnaliste que tu es, je ne peux que m’incliner. Merci parce que du haut de ton master II en sciences de l’information et de la communication, tu as eu l’humilité nécessaire de rappeler à tes co-panélistes (d’une émission que je ne citerai pas), que les journalistes camerounais ne peuvent pas prétendre donner des leçons de journalisme aux Français qui leur ont enseigné ce même journalisme. Je reviendrai sur ce débat-là une autre fois. Mais bravo pour ta clairvoyance au sujet de la MAFIA-FIFA et ses incidences sur l’opium-football camerounais. Bravo pour ton approche de la question juridique de l’homosexualité au Cameroun. Merci de ne pas être à la solde des corrompus de la République. Merci de ne pas être comme tous ces journalistes en veste et cravate, simple ombre d’une manette ou d’une gâchette ministérielle. Merci de ne pas briguer (illégitimement) une place dans la mangeoire politicienne nationale, car pour le moment le Cameroun ne te mérite pas. Demain sans doute.
Commentaires