Voyage dans le calvaire des hôtels du Cameroun
L’enfer commence par Bafoussam, ses agences de voyage et ses hôtels… Il se poursuit par cette situation terrible dans le Sud-Ouest du Cameroun depuis 2016. L’enfer, ce sont ces villes mortes, ces commerces fermés et ces jeunes séparatistes qui sèment la terreur, au nom d’un combat idéologique teinté d’enlèvements, de crimes et de violences quotidiennes. Malgré cette situation de terreur, au bord de l’Océan Atlantique, se trouve le Seme Beach Hotel, situé à 20km de la ville de Limbé, où j’ai rencontré Yann ANOKO, le Directeur Général de la structure.
Mais peut-être devrais-je commencer par Bafoussam. Oui, Bafoussam! Chef-lieu de la région de l’Ouest. Le climat est presque tempéré, alors il faut faire gaffe à sortir couvert. Le problème à l’Ouest et particulièrement à Bafoussam, c’est obtenir une place dans les nombreux bus qui rallient les villes de Yaoundé et de Douala. Nous sommes samedi et je suis de retour de Dschang, où les blogueurs ont rencontré le responsable du musée des civilisations de la ville.
Dschang une belle et grande ville. Une ville au cœur des chefferies des Grassfields, carrefour entre les migrations et les peuplades du Nord-Ouest, du Littoral et du Sud-Ouest. Pendant que les blogueurs tiennent leur Assemblée Générale, le stress s’installe. « Comment vont-ils retourner à Yaoundé et Douala? » dont ils proviennent la plupart ?
L’équation est difficile. Fotso Fonkam pense qu’il est évident de réserver un bus vers 11h. Nous sommes samedi et c’est le grand jour des affluences. Il doit se résigner à rentrer sur Yaoundé à minuit, comme le prévoient les blogueurs en provenance de Douala, bien qu’effrayés par le drame de La Falaise qui est encore frais dans les mémoires. Malheureusement, malgré l’invitation des régionaux de l’étape (Romuald, Romaric et Dirane), Mathias, Etienne et moi prenons la route de Bafoussam. Je pensais secrètement pouvoir rentrer en auto-stop et arriver à Yaoundé vers 23h pour m’éviter ce douloureux voyage de nuits. Fait de déviations, de nids de poules et de freinage brusque, il pourrait me provoquer un arrêt cardiaque.
L’enfer de Bafoussam
Nous arrivons sous la pluie après un voyage dans un minibus serré, entouré de femmes bavardes et qui s’arrêtaient à chaque lieu de deuil ou de funérailles. Il est 18h. Je fonce à la gare routière. La marée humaine qui s’y trouve me démontre déjà que la nuit ne va pas être facile. Toutes les agences sont pleines, tous les bus sont réservés et décolleront tous autour de minuit. Il ne me reste plus que l’option de l’auto-stop. Comme une malédiction, des voitures prennent des gens pour Bangangté, Bafang, Nkongsamba et Douala, mais rien pour Yaoundé. Il est 20h. Je viens de passer deux heures, debout, à crier: « Yaoundé-Yaoundé ». Je finis par m’imposer une pause. Le Taro Sauce jaune est le mets local ici. « J’assassine » un plat avec rage en attendant de me remettre à faire de l’autostop. Peine perdue.
Il est 22h et au même moment, les autres restés à Dschang, annoncent qu’ils sont déjà assis dans leurs bus respectifs. Et mes regrets commencent. Pourquoi ne suis-je pas resté avec eux ? Pourquoi ai-je pensé un seul instant que c’était évident d’avoir une voiture à Bafoussam ? 23h 30. Je dois me résigner à prendre une chambre d’hôtel. Je tombe sur une qui n’est pas loin des agences. La réceptionniste me dit : « 18.000frs la nuitée » et m’explique que ses chambres ne sont pas climatisées. Je lui demande ce qui peut expliquer un tel prix .
– Monsieur, il fait froid à Bafoussam, nous n’avons pas besoin de climatiseur dans les chambres.
– Ah bon madame ? Pourtant, en Europe et en Amérique du Nord, il fait froid également. Pourquoi ils ont la clim là-bas ?
J’ai tout de suite compris que c’est le genre de réponse qui fait fuir les touristes au Cameroun. Le plus grave, c’est que cette dame ne réalise même pas que son hôtel est à deux minutes des agences de voyages. Et à dix minutes du stade de Bafoussam qui va abriter les matches de la CAN 2021 au Cameroun. Comment peut-on être si peu professionnel ? Dans ma colère, je lui ai balancé les 18.000frs et j’ai regagné ma chambre, avant d’emprunter le premier bus de dimanche qui partait à 5h du matin.
Le CHAN, la CAN et les hôtels…
Je repense à cet hôtel de Bafoussam, et je me revoyais, il y’a deux semaines à Limbe, au Seme Beach Hôtel. Sous recommandation de TDK, je me suis rendu à Limbe pour vivre la rencontre Maroc-Cameroun comptant pour le CHAN 2020 au Cameroun. J’avais été motivé, malgré le contexte sécuritaire difficile, par les assurances du gouvernement, quant à la sécurité du site.
Je me suis donc rendu au Seme Beach hôtel, situé à plus de 20km de l’agglomération de Limbé, sur la Nationale Numéro 3. L’itinéraire vous conduit de Douala à Limbé sur l’Océan Atlantique, puis par Ngueme (où se situe le stade de Football) et Batotoke, avant la localité de Seme connue pour l’eau minérale naturelle qui porte le même nom. Je suis accueilli par Yann Anoko.
Des médias ont séjourné ici durant le CHAN, notamment des français et des marocains qui ont profité de l’océan, des courses de chevaux, des distractions diverses, et surtout de la restauration haut de gamme.
Le concours « Miss Beach » a donc repris à Limbé, signe que l’activité touristique reprend peu à peu, mais pour cela, il faudrait une digitalisation de nos hôtels au Cameroun. Beaucoup n’ont pas de formulaire de réservation en ligne. Beaucoup ne sont pas simplement visibles sur Internet.
Yann Anoko se dit donc confiant, mais le syndicat des hôteliers devrait aller au delà. Pourquoi pas mettre en place une charte des hôtels du Cameroun ? Pourquoi pas organiser des foras et autres symposiums pour permettre au hôtels camerounais de revêtir des habits plus dignes pour la CAN 2021 ? En tout cas, chez Yann, on se digitalise déjà et on est déjà connecté.
En comparant mes séjours à Bafoussam et à Limbé, j’ai constaté que l’activité hôtelière, malgré les crises sanitaire et sécuritaire, a encore de beaux jours devant elle. Aux promoteurs de prendre la mesure totale des enjeux de ce secteur.
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