Cameroun : Non, le train de Camrail n’est pas dangereux
5 ans après l’accident ferroviaire du 21 Octobre 2016 au Cameroun, certaines populations appréhendent encore le train. Avec l’ouverture du Train Express de la compagnie Camrail, la ligne reprend vie progressivement. J’ai effectué le voyage…
Comment faire comprendre à mes voisins que leurs bavardages sont un calvaire ? C’est souvent difficile d’expliquer à mes compatriotes qu’il faut respecter le silence d’un lieu commun, surtout s’il s’agit d’un voyage en train. Le ronflement des wagons, les senteurs du paysage, la contemplation de la nature sont autant de moments que le passager a envie de vivre avec tous ses sens.
La première heure de ce trajet a ressemblé à un moment de calvaire. Je me demande si j’avais peur d’un accident ou alors si c’étaient vraiment ces causeries qui me mettaient mal à l’aise ? Entouré de trois messieurs d’un âge respectable qui se sont retrouvés pour se remémorer leurs souvenirs d’enfance et leurs combats politique, j’ai dû « subir » les 50 premières minutes en leur compagnie. Le train est bel et bien parti à l’heure (14h 30) et à 15h19, c’était la première escale à la gare de Ngoumou.
Revenons à mes voisins. Deux n’étaient pas vraiment à leurs place. Car dans le Train Express de Camrail, les places sont numérotées et inscrites sur le billet. Mes voisins ont juste profité des places vides de notre compartiment pour improviser un débat entre eux. Le premier a raconté comment il s’en était sorti après un AVC. Le deuxième a insisté pour démontrer que le vin était bon pour le cœur, et le troisième, celui que les deux premiers étaient venus voir, a estimé qu’il ne pouvait pas payer le repas servi dans le train, car selon lui, « je croyais que c’est comme l’avion. Le repas servi à bord doit faire partie du package ». Est-ce une suggestion à peine voilée faite à la société Camrail ? Toujours est-il que moi je ne me suis pas privé de commander mon poisson grillé.
Finalement, mes voisins se sont avérés être des personnes agréables. Des discussions joyeuses se sont entamées, y compris celle relative à l’accident mortel du 21 Octobre 2021, un vendredi noir, 5 ans plus tôt, comme ce même vendredi où le destin nous a permis de nous rencontrer et de nous raconter. La suite est un agréable moment, entre les sonorités distillées dans le train, les annonces de l’hôtesse et le paysage magique qui se dresse à chaque arrêt : 15h 54 (Makak), 16h 40 (Eséka), 17h 18 (Messondo), 17h 58 (Edéa) et enfin, l’arrivée à Douala à 19h, sans même remarquer que le voyage a duré 4h et 30 minutes.
Le train est stable, loin des secousses de la route, et de l’angoisse des dépassements et des coups de freins. Loin de ces moments où personne n’a envie de fermer l’œil parce que la route est toujours un moment d’incertitude.
Le voyage était confortable et agréable. La peur est dissipée. Non, le train n’est pas dangereux. Il comporte aussi ses risques certes, mais dans le monde entier, le train reste l’un des moyens de locomotion les plus sûrs.
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